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Obtention d’un PHRC pour un projet d’identification des maladies du foie indéterminées

Les 2 centres de compétences des maladies du foie d’Henri-Mondor viennent d’obtenir un programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) sur un projet innovant d’identification des maladies du foie indéterminées. Ces deux centres sont :

Nous nous sommes entretenus avec le coordonnateur de ces centres, le Pr Vincent Leroy, sur ce sujet.


Quel centre de compétence est le plus concerné par ce PHRC ?

L’approche que nous avons choisie se situe en amont du diagnostic de la maladie rare du foie. Il concerne donc nos deux centres de compétence et même, de manière transversale, l’ensemble de la filière de maladies rares Filfoie.


En quoi consiste ce projet d’identification des maladies du foie indéterminées ?

Nous nous intéressons aux maladies indéterminées du foie. Dans 8 à 10 % des cas, la cause des maladies chroniques du foie n’est pas identifiable. Parmi les causes les plus fréquentes, on peut noter l’Hépatite B, l’hépatite C, l’alcool, le foie gras, le diabète, etc. Plus rarement, il y a par exemple des maladies génétiques ou auto-immunes. Puis, il y a d’autres maladies que nous n’avons pas encore identifié. C’est important, car si on a identifié la cause, on peut traiter la maladie. Donc, si on n’a pas de cause, on ne peut pas la traiter.

Parallèlement, de nouvelles stratégies thérapeutiques se développent maintenant, car beaucoup de maladies rares ont un traitement. Par exemple, avec des anticorps monoclonaux, on peut modifier la transcription de nouveaux gènes.

Nous avons commencé à nous intéresser à ces sujets. Pour ces personnes malades du foie, beaucoup d’outils peuvent aider à identifier la cause de l’hépatopathie : bilans biologiques, IRM, scanner, biopsie, etc. Cependant, même parfois avec tous ces dispositifs la cause n’est pas identifiée, soit parce qu’il s’agit d’une maladie très rare, soit par ce qu’elle s’exprime d’une manière atténuée ou sous une forme trompeuse empêchant de la reconnaître.

Nous avons ainsi mis en place, depuis un peu plus d’un an, un programme nommé LIPHE, qui est un protocole de soins courant innovant. Ce programme inclut une consultation d’hépatologie spécialisée associée à de la biologie avancée, permise par la présence de laboratoires d’excellence sur le site Henri-Mondor, tels que le Centre National de Référence sur les hépatites virales et des plateformes techniques performantes (métagénomique, auto-immunité).

Ces examens sont complétés par un bilan d’imagerie permettant de faire un phénotypage augmenté du foie. Il associe une IRM multiparamétrique que nous avons appelée IRM LIPHE, dont le protocole, a qui utilise un produit de contraste spécifique du foie, été mis au point par l’équipe de radiologie du site.   Il est ainsi possible de doser la graisse dans le foie, le fer, d’évaluer la morphologie du foie, les vaisseaux sanguins microscopiques, les canaux biliaires et mesurer la quantité de fibrose selon une technique appelée élasto-IRM. L’IRM est complétée par une échographie associée à des mesures d’élasticité du foie et de la rate.

Lorsque ce bilan étiologique n’a pas permis d’obtenir un diagnostic, une biopsie hépatique est proposée aux patients. Celle-ci est effectuée sous échographie en hôpital de jour dans le service. La qualité de l’analyse est renforcée par l’expertise des anatomopathologistes du foie de Mondor et par l’utilisation de techniques très innovantes telles que la métagénomique, qui permet d’identifier des agents infectieux dans le foie, ce qui est le cas dans 5 à 10% des cas, en particulier chez les patients immunodéprimés.

A l’issue de ce « phénotypage augmenté du foie », un diagnostic est posé dans près de 50% des cas, permettant le plus souvent l’instauration d’un traitement.


Quels sont vos prochains projets d’avenir ?

L’étape suivante est la mise en place du protocole D-LIPHE, qui vient d’être accepté au PHRC. En se basant sur le programme existant, les techniques les plus avancées seront utilisées sur les situations les plus complexes, c’est-à-dire les patients restant sans diagnostic à l’issue de l’ensemble du bilan incluant la biopsie hépatique. De nombreuses maladies génétiques rares expliquent au moins probablement autour de 30% de ces hépatopathies. Pour les identifier, une analyse génétique reposant sur séquençage complet du génome (exome) sera effectuée par le laboratoire de génétique du site.

En parallèle, nous développons un projet de transcriptomique où le profil global d’expression des gènes dans le foie pourra être évalué. Nous sommes ainsi en collaboration avec le laboratoire d’anatomopathologie et le laboratoire de recherche INSERM Virus Hépatologie Cancer de l’IMRB en train d’établir un atlas transcriptomique des maladies du foie, consistant à établir un profilage des maladies du foie permettant des comparaisons avec des profils connus

A l’avenir, nous aimerions faire développer ce profilage en s’aidant de l’intelligence artificielle. Nous serons capables d’encore mieux faire correspondre les profils semblables, par exemple si la maladie est inflammatoire, infectieuse, auto-immune ou génétique).


Comment ce programme va-t-il optimiser la prise en charge de patients ?

Le traitement de la cause des maladies du foie est crucial. Globalement, il est possible de modifier l’histoire naturelle de ces maladies, en évitant par exemple la cirrhose ou le cancer primitif du foie. Si l’on regarde sur les listes d’attente des greffes de foie, on retombe sur ces 8-10 % de maladies non identifiées qui auraient pu être traitées avant le stade des complications. L’enjeu est aujourd’hui plus important, car des progrès thérapeutiques majeurs sont en cours dans de nombreuses maladies du foie, en particulier d’origine génétique.

Une fois le diagnostic effectué, la prise en charge peut être optimisée en bénéficiant des nombreux centres de référence maladies rares de l’AP-HP, telles que référencés par la plateforme ESMARA. Par exemple, le programme LIPHE a récemment permis de diagnostiquer une maladie génétique rare appelée déficit en alpha-1 antrypsine, qui a permis l’instauration d’un traitement spécifique d’un emphysème pulmonaire, qui était lié à la même maladie. La prise en charge de ce patient a ainsi été totalement modifiée.

 

Quelle est la plus-value pour le GHU HM ?

Il s’agit d’un programme multidisciplinaire et structurant, impliquant beaucoup de laboratoires et de services, notamment les laboratoires d’analyse médicale, la virologie, l’imagerie, la médecine interne, l’anatomopathologie, les maladies globules rouges, etc. Il s’agit d’une activité de recours multidisciplinaire, très innovante, en adéquation avec le projet de territoire du GHU. Trop de maladies sont découvertes à des stades trop tardifs et le sujet de l’errance diagnostique est au cœur du projet.